Jack London et la photographie

Association des Amis de Jack London - Logo L'association des Amis de Jack London est partenaires des 4èmes rencontres Automne photographique en Champsaur, consacrées à un dialogue photographique avec cet immense écrivain.

Son président, Noël Mauberret - également éditeur et traducteur de nombreux ouvrages de Jack London - nous propose un texte consacré aux rapports de Jack London avec la photographie...




Jack London et la photographie

  • par Noël Mauberret, Président de l’Association des Amis de Jack London


A sa mort, en 1916, à l’âge de quarante ans, Jack London avait écrit cinquante livres, il avait aussi pris douze mille photos. Et dès qu’il devint un écrivain à succès, il fut aussi l’un des hommes les plus photographiés des USA. Il fit très souvent la ‘une’ des grands journaux, grâce à son talent, mais aussi à cause de son engagement. Il était socialiste à une époque où ce mot faisait peur et il le resta même quand il devint millionnaire et grand propriétaire terrien ! Et sa vie sentimentale, ses voyages et son goût pour la boisson étaient une mine d’or pour les journalistes de la ‘presse people’.

Jack London fut un écrivain-aventurier. Il aimait l’aventure, parce qu’elle représentait la découverte de choses nouvelles, mais surtout parce qu’elle l’amenait à rencontrer les hommes, dans leur diversité. Pendant la ruée vers l’or du Klondike, en 1896, il passa un an à discuter avec les trappeurs, les orpailleurs et les indiens. Ce qu’il en retint constitua son filon, la source d’une dizaine de livres dont Croc Blanc et L’appel de la forêt. Mais en 1896, il n’avait pas encore d’appareil photo, il était trop pauvre et le matériel était difficile à transporter.

Jack London photographeQuand il découvrit le nouvel appareil Kodak portatif à soufflet, en 1902, il sut tout de suite en tirer parti. Arrivé à Londres pour un reportage sur la guerre de Boers et ayant appris qu’elle était terminée, il eut une idée, se déguiser en SDF et aller décrire et photographier l’East End, le quartier le plus misérable de la capitale anglaise. Il en tira un livre-témoignage illustré : Le peuple d’en bas. Livre naturaliste d’un militant qui montre les chômeurs, les asiles de nuit de l’Armée du salut, les enfants en guenilles, la ‘misère’ (en français dans le texte, en hommage à Hugo) de la capitale orgueilleuse de l’empire le plus puissant de la planète.

Et partout où il ira ensuite, toujours, jack London écrira et prendra des photos, que ce soit pour témoigner ou pour accompagner son travail de création littéraire. Et on découvre en lui un grand reporter photographe qui sait choisir un point de vue et un cadrage, qui sait jouer avec l’espace et nous laisse parfois deviner ce qu’il y a ‘hors champ’. Toujours curieux, toujours compatissant, jamais voyeur. 200 de ces photos sont regroupées dans un livre, Jack London photographe, de Jeanne Reesman, Sarah Hodson et Philip Adam (Editions Phébus)

Pendant la guerre russo-japonaise, en Corée en 1904, il photographie les soldats japonais, les prisonniers russes, mais aussi le peuple coréen : familles fuyant les combats, vieillards très dignes, enfants étonnés. Ses images furent vues dans le monde entier. Hugo Pratt imagina plus tard que son héros Corto Maltese rencontrait là Jack London et le déserteur russe Raspoutine. Ce fut le début, la ‘jeunesse’ de Corto Maltese (La genèse ?).

Quand un tremblement de terre détruit en 1906 sa ville natale, San Francisco, Jack London montre la ville anéantie, effondrée et disloquée, Mais, refusant le voyeurisme, il ne fait pas de plans rapprochés des victimes.

Charmian London - Ile des SalomonPendant sa traversée du Pacifique, il photographie les lépreux de l’île de Molokaï, dans l’archipel d’Hawaï, montrant un orchestre ou un groupe d’infirmières lépreuses qui soignent leurs camarades. Ces malades, victimes des préjugés de l’époque, faisaient peur. Jack London modifia l’image que l’on avait d’eux. Dans les îles Salomon, il photographie des guerriers fiers en légère contre-plongée. Contrairement aux photos de l’époque ils ne font pas peur et ils ne font pas rire. Sur un cliché pris au marché de Malaita, une île des Salomon, on voit Charmian, la femme de Jack, entourée de femmes noires presque nues. Elle porte à la taille, un gros colt 45! La photo fit scandale et Jack dut imposer sa publication, pas à cause du pistolet ni des femmes nues mais parce qu’une blanche les côtoyait de façon ‘naturelle’.

L’Association des Amis de jack London est ravie que l’Automne Photographique en Champsaur 2016 prenne pour thème la vie et l’œuvre de Jack London. Nous apportons tout notre soutien à cette manifestation. Nous espérons que les clichés pris par Jack London, sa vie de grand reporter, d’aventurier et de témoin actif de son époque ainsi que son œuvre aux multiples facettes inspireront de nombreux photographes. Bonne chance à tous !



A consulter :


  • Site internet : Jack-London.fr (site de l'association des Amis de Jack London)
  • Jack London Photographe ; Editions Phébus (photos : Les bas-fonds de Londres. La guerre en Corée. Le tremblement de terre de San Francisco. Les mers du sud. La révolution mexicaine…)
  • Œuvres complètes de Jack London ; Editions Phébus-Libretto (40 volumes)
  • Jack London ; L’amour de la vie ; Editions Gallimard ; Folio.
  • Jennifer Lesieur ; Jack London (biographie) ; Editions Phébus- Libretto
  • Yves Simon ; Jack London, le vagabond magnifique ; Editions Destins-Menges
  • L’aventurier des mers, Jack London ; Editions Carré Voiles (très belles photos en illustration)